LNH

GIRAULT l’art de la différence !

LNH - Publié le 13 janvier 2017 à 12h26
LNH
C'est l'histoire d'un joueur, d'un champion, d'un entraineur devenu consultant. C'est l'histoire d'un homme tout simplement...

Derrière un champion se cache un homme toujours hésitant à se découvrir. Exercice de style avec Olivier Girault, ancien de la LNH devenu consultant sur beIN Sports et RMC.

« ...m’inscrire dans le rôle du méchant, cela m’a facilité les choses... »

L’image n’est pas figée dans l’album souvenir de ses jeunes années. Celle du beau gamin guadeloupéen, costume tiré à quatre épingles, souliers vernis le dimanche avant de se rendre à la messe. Olivier Girault a tout fait pour dissiper le mirage d’une vie promise au confort avant la séparation de ses parents. Mais il a eu beau frotter fort sur le papier glacé de son passé, l’image n’a plus jamais déserté son esprit. Il s’est bien essayé à quelques fredaines à Vaires sur Marne lors d’un exil d’abord difficile en Métropole, et croire finalement que le bien et le mal peuvent faire bon ménage, il n’a jamais pu tromper les vrais baroudeurs de vie. Il a, dans un premier temps, réussi le décalage, adepte de la provocation à outrance, sa manière d’exister. « J’aimais bien déranger, prendre le contre-pied, habiter des rôles décalés. A un moment, au Paris Handball, j’achetais des voitures de sport et on me pointait du doigt. Les bagnoles, je m’en foutais, j’attendais seulement la réaction des gens. J’ai pu me rendre compte très tôt qu’ils ne jugent que sur les aspects extérieurs, qu’ils se refusent, en revanche, à aller voir à l’intérieur de l’être. Agir de la sorte, m’inscrire dans le rôle du méchant, cela m’a facilité les choses et cela a été une protection. Personne, dès lors, n’osait poser le pied sur le seuil de ma porte. »

« J’étais peut-être même banni avant de commencer... »

Joueur emblématique des années 2000 au Paris Handball (après Massy, aujourd’hui acteur de premier plan en Proligue ou encore Livry-Gargan), comment imaginer, alors, que Girault ait pu se hisser au plus niveau de sa hiérarchie jusqu’à devenir capitaine de l’équipe de France à la suite de l’unique Jackson Richardson ? Leader, une fois de plus très différent quand il n’était pas titulaire à son poste. Il s’est toujours amusé de ces paradoxes. Déroutant de la même manière lorsqu’il s’engage dans le métier d’entraîneur après le sacre olympique de Pékin en 2008 avec son costume trois pièces sur le banc, avec cette gouaille irritante qui dresse alors le poil du monde du handball. « J’étais peut-être même banni avant de commencer. Je me souviens que cela allait loin, que les agents, par exemple, se refusaient à travailler avec moi. En tous cas, ils ne me proposaient aucun joueur. » Il a vite compris qu’il s’était trompé de voie. « J’ai vécu, ce que j’appelle le syndrome Maradona. Quand le génial meneur de jeu argentin est devenu entraîneur, il ne supportait pas que l’un de ses joueurs ne réussisse pas un contrôle de balle. J’ai été un peu pareil. En fait je n’étais pas prêt à l’effort dans ce métier, pas apte à accepter les défauts de mes joueurs, pas en capacité de supporter les faiblesses de l’humain. Ca me demandait une patience qui me rendait malheureux, donc non opérationnel. J’ai su très vite que j’avais choisi ce boulot pour de mauvaises raisons.» Alors, il a disparu après deux années et demi d’exercice, exclu d’un milieu qu’il avait animé de ses extravagances et de ses différences.

« Je tiens à ma sincérité... »

Il s’est construit, enfin, un destin, une vie en passant par le monde universitaire avant de décrocher un MBA en management et en économie sportive puis de revenir, apaisé, sur beIN Sports, RMC dans un rôle de consultant. « Vers ce que j’aime par-dessus tout, le handball. » A sa manière toujours, riche de franchise au fil du discours fluide de ceux qui connaissent leur sujet mais se refusent à toute compromission. Quand on lui demande d'aller récupérer des informations au plus près de l'équipe de France, il décline, ne se sentant pas à l'aise avec cette mission. " Même si c’est toujours ma famille, j’ai trouvé que cela était inapproprié. Je tiens à ma sincérité, à mon ressenti et le seul moyen de rester moi-même, c’était évidemment de prendre un peu de distance. Les joueurs le savent et je crois qu’ils me comprennent. »

Olivier Girault n’est plus en conflit avec lui-même, avec les autres, il a appris à défendre les siens désormais. « Je crois aux valeurs de notre sport, à cette communion, à cette proximité que l’on a réussi à installer. Je trouve mon sport sain mais je sens pointer les dangers qui ont fait vaciller d’autres activités quand elles ont été médiatisées. Il est préférable d’anticiper plutôt que d’agir en réaction. » Olivier Girault est devenu un témoin avisé de son sport, prêt, plus que jamais désormais, à s’investir, à le protéger. « La Ligue est garante des institutions et nos clubs ont bien pris le virage de la nouvelle économie. Mais il y a tant à faire encore. On grandit seulement… »

Comme lui a également si bien su le faire, après tant de crises de croissance.

Laurent Moisset