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A la découverte de... Victor Boillaud

LNH - Publié le 27 avril 2017 à 16h10
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Des terrains de handball aux bureaux de la Ligue Nationale de Handball il n’y a parfois qu’un pas. Un pas synonyme de reconversion réussie, franchi par Victor Boillaud, ancien joueur de Sélestat, Créteil et Mulhouse qui, à 31 ans, occupe désormais le poste d’assistant communication et évènementiel à la LNH.

Posté derrière son bureau, Victor Boillaud a le regard fixé sur son écran, la main occupée à maltraiter sa barbe, en tirant les poils un à un. "Je crois que c’est désormais un TOC", sourit-il. En bon psychologue de comptoir, on pourrait soulever l’idée du manque d’activité d’une main droite plus habituée à tâter la balle pégueuse qu’à glisser sur le clavier. Salarié de la Ligue Nationale de Handball au poste d’assistant communication et événementiel depuis décembre 2015, le jeune homme présente en effet un profil un peu particulier: celui de l’ancien joueur de haut niveau, - "l’un des meilleurs de sa génération à son poste", dixit Mickaël Robin - désormais passé de l’autre côté de la barrière. Un profil à part, pour un parcours qui l’est tout autant. 

Au démarrage pourtant, la carrière de Victor suit un chemin classique, celui du gamin qui découvre le handball sous le préau, migre rapidement vers le club du coin, Dijon, et fréquente les équipes départementale et de Ligue avant d’entrer au Pole. "Mon père m’a alors fixé des objectifs à court, moyen et long terme. Si je n’y répondais pas, j’arrêtais, se souvient-il. Mon objectif final à l’époque, c’était de devenir pro, et de jouer en Proligue." Et les points de passage, le demi-centre les avale un à un, migrant au bout de deux ans vers le centre de formation de Sélestat. "J’y avais des copains rencontrés en stage de zone. C’est un peu ça qui m’a séduit", se justifie-t-il. 

Epoque SAHB, avec Mickaël Robin. (Blog de scshb)

"De par mon poste, j'ai appris à aller vers les gens"

C’est donc en Alsace que le jeune arrière fourbit ses armes et se forge sa personnalité. "C’était quelqu'un d’assez réservé au départ, glisse Mehdi Ighirri. Mais dès qu’il prenait un peu de confiance, il était vraiment précieux." Un point de vue partagé par Mickaël Robin, le meilleur ami de jeunesse, avec qui il fréquente notamment les équipes de France Jeunes et Juniors. "C’est quelqu’un qui avait vraiment du handball, avec de belles qualités explosives, ajoute le gardien de but. Et puis humainement s’il pouvait paraître réservé, il avait en fait énormément d’humour. Un vrai clown !" Le principal intéressé confirme: "Je pense que j’étais quelqu'un de réservé, et puis, de par mon poste, j'ai appris à aller vers les autres"

Au second plan ? Le tout jeune Yanis Lenne.

C’est finalement au terme de l'exercice 2008/2009 que Victor Boillaud se décide à quitter le nid alsacien, au terme de sa "meilleure saison, la première jouée sans blessure". Direction Créteil, histoire de "passer un cap". Une nouvelle aventure qui tourne vite au vinaigre, puisqu’il joue peu, et le club se retrouve relégué en Proligue. Une année galère qui fait cogiter le bonhomme. "Je me suis aperçu que le hand pro ne me faisait pas forcément kiffer. Il y avait des choses qui me plaisaient, d’autres moins. Ce qui me plaisait, c’était de prendre du plaisir avec les potes, et là, je n’avais plus ce plaisir-là, celui de la pratique. Tout ça me pesait, souffle-t-il. C’est à ce moment-là que j’ai décidé de commencer à travailler." Après un conflit avec Créteil, Victor décide de revenir en Alsace, du côté de Mulhouse, en Proligue, où il pourra concilier vie sportive et vie professionnelle. 

Un burn-out en forme de point final

Un choix pas forcément surprenant pour Mickaël Robin. "Il a rapidement senti qu’il pourrait se sentir à l’étroit dans ce petit milieu qu’est le handball. Du coup, il n’a jamais laissé tombé les études", explique son ami. Titulaire d’un Bac S et d’une Licence Sciences de la Terre de l’Univers et de l’Environnement, il  rejoint à temps partiel l’entreprise Objectif+, détenue par le président mulhousien, au poste de chef de fabrication. Un double-projet qui ouvre les yeux du jeune homme. "Quand on est joueur, on est dans une bulle et c’est compliqué d’en sortir. Ca m’a aidé à me rendre compte des bases, comme le fait de se lever le matin pour travailler à 8h. Je me suis rendu compte que le discours que l’on tient parfois quand on est joueur est un peu ridicule..." 

Entouré d’une bande de potes, et alors que les bons résultats s’enchaînent avec Mulhouse, Victor s’épanouit à nouveau. "Avec ce projet, il a réussi à anticiper les choses. Il savait que ça devait arriver un jour, et il a pris les devants. C’est quelque-chose qui n’est pas toujours facile quand on est joueur", souligne Thomas Cauwenberghs. Reste que tout cela ne dure qu’un temps, puisqu’en début de saison 2013/2014, tout s’écroule. "J’ai fait un burn-out, souffle-t-il pudiquement. Je tirais sur la corde, je n’osais pas m’en rendre compte. J'ai complètement craqué." Ses coéquipiers sont alors impuissants. "Les objectifs du club et de la boîte ont évolué. On lui demandait beaucoup des deux côtés, et à un moment, ça a craqué", se souvient Mehdi Ighirri. Mais devant le fait accompli, Victor Boillaud prend sa décision: le handball, c’est terminé. 

Une nouvelle vie... sans ballon !

Un voeu pieux puisque le handball va de nouveau faire son apparition dans son quotidien à l’été 2015, quand, surfant sur LNH.fr, il découvre une annonce pour le poste d’assistant communication et événementiel. "Je ne sais même pas pourquoi je suis allé là, rigole celui qui sort alors d’une formation continue pour devenir chef de projet multimédia. J’ai un peu postulé sans trop d’espoirs. Je suis même venu me vendre dans les locaux de la Ligue, et quand j’ai appris qu’il y avait eu plus de 600 CV, je suis reparti sans même dire mon nom !" Pourtant, le CV trouve vite sa place en haut de la pile. "Son passé de handballeur était la cerise sur le gâteau car ce n’était pas vraiment un critère. Le CV correspondait simplement à ce que l’on cherchait", explique Noémie Catalan, responsable communication et événementiel de la LNH.  

Et l’entretien finit de convaincre la Ligue. "On a trouvé quelqu’un de calme, qui prenait le temps de répondre, qui n’avait pas de certitudes et qui était surtout motivé par le challenge, ajoute Christophe Janot, le directeur de développement. On s'est aussi dit que la reconversion, ce n'était pas forcément toujours un sujet pour les autres." En poste depuis désormais près d’un an et demi, Victor Boillaud, qui refuse pour le moment de retoucher un ballon - "J’ai tout sauf envie" - , a en effet trouvé un nouveau carburant. "Je suis vraiment content d’être ici. L’ambiance et l'équipe sont sympas. C'est plutôt jeune et dynamique. Je touche à plein de choses et puis la Ligue a de belles perspectives de développement. Je découvre aussi l’événementiel. Quand tu es joueur, tu penses être le centre de tout, là je peux voir les à-côtés. Les matches deviennent secondaires, ça ne m’intéresse plus vraiment. Le reste est en revanche vraiment excitant...", conclut-il. Et tant pis pour les poils de barbe…

Benoît Conta