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CDL / A l’âge adulte

LNH - Publié le 26 mars 2015 à 11h47
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Née dans la foulée du titre mondial 2001 à Bercy, la Coupe de la Ligue, d’abord en quête d’équilibres, est devenue un événement incontournable et attendu de la saison.

Le terrain était en friche et les idées un peu vagues au début des années 2000 quand il s’agissait d’estimer les perspectives de développement du handball français, de mettre en adéquation les intérêts de l’équipe nationale, double championne du monde depuis janvier 2001, et des clubs hexagonaux rassemblés alors sous l’égide de la seule fédération. Le handball, alors, était la dernière niche des sports collectifs à ne pas se reposer sur une ligue professionnelle et c’est sous la pression du ministère des sports que la FFHB mit en place un comité de pilotage, chargé d’évaluer et d’organiser les conditions de création de la future LNH. René Richard, vice-président de la Fédération, Daniel Costantini, démissionnaire de son poste de sélectionneur, et Nicolas Bernard, président de Dunkerque et des clubs professionnels, s’attelèrent à la tâche. Au pas de charge d’ailleurs puisqu’avant même d’officialiser la naissance de la Ligue -le 21 mai 2004 à Dunkerque- la Coupe de la Ligue -baptisée René Richard du nom donc de l’un de ses pères fondateurs- vit le jour et tint sa première représentation en février 2002 à Sélestat et à Strasbourg!

“ C’est Nicolas Bernard, se souvient Daniel Costantini, qui a émis l’idée et poussé le projet. A l’époque les clubs étaient en effet très demandeurs d’une compétition pour meubler l’hiver. Très vite, il y a eu consensus. ” Et comme il fallait donner satisfaction à un maximum de clubs, le modèle de compétition s’inspira fortement de la Semaine des As au basket avec huit participants, retenus via leur classement à la trêve. Nouveau-né prématuré, toute la difficulté consistait à installer l’événement, à l’ancrer dans les mémoires et, surtout, à lui donner les moyens de grandir. Un autre défi s’annonçait donc : celui de convaincre alors qu’il fallait vivre dans l’ombre de la Coupe de France tout en harmonisant les intérêts des uns et des autres.

“ J’ai longtemps été un contestataire, avoue Patrice Canayer, l’entraîneur multi titré de Montpellier. La compétition se déroulait, à l’origine, juste derrière l’Euro et le Mondial au moment où je récupérais mes Internationaux, fatalement fatigués. Pour moi, cette compétition était tout simplement mal placée dans le calendrier. ” Probablement l’une des raisons pour lesquelles, le club héraultais n’apparaît pas au palmarès des deux premières éditions, ajoutée évidemment à la réticence de Patrice Canayer à engager ses troupes dans une aventure jugée trop périlleuse à ses yeux. Sportivement, cependant, l’épreuve a trouvé grâce auprès des joueurs. Vainqueur avec Créteil en 2003 à Besançon, pour sa deuxième apparition, Nicolas Lemonne a gardé la mémoire forte. “ D’abord le plateau était relevé avec les meilleures équipes du Championnat et un titre était en jeu. Tout joueur est un compétiteur et je crois que nous avons tous mordu à l’hameçon. ” Avec vingt arrêts en finale de son gardien, Créteil éteignit les Montpelliérains (27-23) mais Grégory Anquetil, le grognard pourtant vaincu, alluma la mèche des ambitions sudistes dans cette compétition. “ Championnat du monde, Coupe de France, Coupe de la Ligue ou match de patronage c’est tout pareil pour nous. On ne veut rien laisser aux autres. ”

L’année suivante, le Champion de France signera son premier succès dans l’épreuve, le début aussi d’une très longue domination. Si la voracité d’Anquetil et des siens a apaisé les doutes de leur entraîneur, la Ligue travaille sur l’évolution et la modernisation de sa Coupe. Dès 2004, elle se dispute en mai, soit en bout de saison et après les cinq premières éditions le format est ramené à un mode Final Four en 2007. Quand Alain Smadja, président de la LNH, annonce quelques mois plus tard, que sa Coupe s’exportera jusqu’à Miami aux Etats-Unis, le buzz est immédiat. La LNH est la première Ligue à exposer sa vitrine à l’étranger sur le site grandiose des Miami Heats. Elle sera aussi la première victime d’un échec populaire retentissant. Mal épaulé par les organisateurs américains, la salle est désespérément vide et la perte financière obligera même Alain Smadja à porter le contentieux devant la justice. Battu en finale, Patrice Canayer a parlé d’une Coupe Walt Disney. Sportivement pourtant, la compétition n’a jamais été aussi passionnante et relevée avec des confrontations de grande qualité et la victoire du “ petit ” Istres. Malgré l’ampleur des dégâts colatéraux, on n’a jamais autant parlé de la Coupe de la Ligue.

“ Cela a été le début d’autre chose, rappelle Etienne Capon, le directeur général de la LNH. Dans l’esprit des gens, la Coupe de la Ligue était inscrite et ancrée en dépit des mauvais retours. ” Avec le recul, Patrice Canayer abonde dans son sens. “ C’est paradoxal, oui, mais elle s’est probablement fait un nom, son nom aux Etats-Unis. ”

La piste étrangère sera abandonnée, mais reprise et mise à profit en Tunisie avec le Trophée des Champions ces deux dernières années qui réunit les vainqueurs de la saison précédente. Elle sera expérimentée dans une dernière configuration lors de la saison 2010-2011 avec matches aller retour à élimination directe et finale sur un match sec dans le palais des sports de Pau avant de retrouver sa forme la mieux adaptée, le Final Four.

“ Elle a mis du temps, décrit Canayer, titré à 9 reprises et acteur majeur de la jeune histoire, à trouver sa place mais elle est désormais intelligemment calée dans un calendrier pourtant chargé. Son modèle est intéressant puisqu’il permet aux plus petits de s’offrir, eux aussi, une part de lumière et de reconnaissance. A mes yeux, elle est devenue aussi prestigieuse que la Coupe de France. ”

A l’âge adulte, la Coupe de la Ligue dispose désormais de tous les atouts pour bien vieillir. 

CHIFFRES CLES

3

Saint-Raphaël a disputé trois finales (2010, 2012, 2014) et s’est incliné trois fois et toujours face au même adversaire : Montpellier. Paris a connu la même mésaventure à deux reprises (2005, 2006) également face à l’incontournable ogre héraultais.

5

C’est le nombre de victoires consécutives de Montpellier entre 2004 et 2008, un record toujours inégalé.

9

Montpellier a participé à onze finales en treize éditions et s’est imposé à neuf reprises. Un record qu’il détient loin devant Chambéry (2002), Créteil (2003), Istres (2009) et Dunkerque (2013) vainqueurs une seule fois.

9

Fidèle à Montpellier depuis le début de sa carrière, Michaël Guigou est le seul joueur à avoir remporté neuf fois le trophée. Le Serbe Mladen Bojinovic a lui réussi l’exploit d’en remporter huit en dix ans de présence au club avant son départ pour Paris en 2012.

ANECDOTES

SMADJA AUX STATISTIQUES

Passionné de handball après avoir été joueur, arbitre, dirigeant, et président de la CNACG à la Fédération, Alain Smadja, qui allait devenir le deuxième président de la LNH dès 2005 à la suite de Vincent Narducci, était présent lors de la première Coupe de la Ligue à Sélestat. Dans un rôle nouveau pour lui puisqu’il était statisticien auprès du spécialiste Armand Steiger. “Pour rien au monde, je n’aurais voulu manquer ce rendez-vous… ” 

LES REGRETS DE RICHARDSON

Eliminé en demi-finale par Ivry le 19 mai 2007, Jackson Richardson qui a annoncé quelques semaines auparavant sa retraite en fin de saison, quitte la scène avec tristesse. “ Je ne le montre pas, avoue-t-il, mais je le suis profondément. J’aurais tellement aimé laisser une trace dans mon club. La déception est d’autant plus forte que j’ai toujours remporté un trophée dans  les clubs où je suis passé. ”

DES JEUNES DANS LE VENT

Le 3 février 2008, Montpellier remporte sa cinquième Coupe de la Ligue consécutive contre Créteil (26-23). La performance est d’autant plus marquante que Patrice Canayer a dû se priver d’une partie de ses cadres au retour de l’Euro norvégien et de la Coupe d’Afrique (Guigou, Abati, Junillon, Juricek, Maggaiez et M’Gannem) et lancer sa nouvelle vague. Honrubia, Accambray, Salou, Tomas et Di Panda participent activement au succès héraultais en inscrivant 13 des 26 buts de leur équipe.

2009 : L’HUMOUR DE CANAYER

A la surprise générale, Istres bat le grand Montpellier en finale (22-20) à Miami aux Etats-Unis le 11 avril 2009. Face à la pénurie de buts, Patrice Canayer avance une explication déroutante. “ De tous les arrières montpelliérains, Jordan François Marie a été le meilleur. ” Un trait d’humour puisque cette saison-là, le jeune arrière (4 buts inscrits) avait, ironie du sort, été prêté au club provençal.

LA COUPE A GERARD

Parmi les grands bonshommes de la Coupe de la Ligue, Vincent Gérard, le gardien actuel de Dunkerque, garde une place privilégiée. Avec Istres en 2009, il avait écoeuré les attaquants de Montpellier avec 26 arrêts en finale à 54% de réussite ! Quatre ans plus tard, il est le grand artisan du succès nordiste avec 21 parades en demi-finale et 20 en finale. Sur les deux matches face à Chambéry puis Nantes, il réalise un autre exploit en arrêtant neuf jets de sept mètres. Un record toujours en cours.