Et Thibaud s'est mis à briller...

LNH - Publié le 15 janvier 2021 à 10h18
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Auteur d’un début de saison canon avant de se blesser, Thibaud Briet a su faire sa place au sein de l’effectif de Nantes, et ce malgré un parcours hors des sentiers battus. Reste désormais à confirmer.

"On est dans l’Ouest, ici. Quand la légende dépasse la réalité, on publie la légende." Si on avait suivi John Ford, réalisateur du film « L'Homme qui tua Liberty Valance », alors on aurait écrit que la carrière de Thibaud Briet s’est joué sur un coup de téléphone, au début de l’année 2019. "Je voulais intégrer un centre de formation, et comme Sélestat ou Dunkerque, il me semble que Nantes n’avait pas spécialement porté d’intérêt à ma candidature. Mais j’ai réussi à avoir le numéro de Grégory Cojean (le directeur de centre de formation du H, ndlr), raconte le jeune arrière gauche. Je l’ai appelé, et j’ai réussi à le convaincre de me faire passer un test." Voilà pour la légende. De l’autre côté du téléphone, la réalité diffère un peu. "Je ne me souviens pas de ce coup de téléphone, sourit Greg Cojean. Ce qui est sûr, c’est que sa candidature était encore sur mon bureau. C’était sans doute la dernière, mais je l’avais encore en tête. Alors, sans doute m’a-t-il appelé, et c’est ce qui a déclenché l’essai. Mais j’avais déjà envie de le tester."

Voilà pour le point de départ. Pour la suite, on espère que vous êtes bien attachés, car Thibaud Briet n’a pas vraiment de temps à perdre. Du haut de ses 2,05m, le jeune homme débarque dans la Cité des Ducs de Bretagne avec la ferme intention de quitter sa Normandie natale, où il évolue en Nationale 3 depuis deux ans, sous les couleurs de Rouen. Passé en dehors des radars fédéraux et des clubs professionnels, l’arrière gauche n’a en effet grandi que sur le tard, avec une poussée de 25cm autour de ses 17 ans. "Mais depuis que je suis en seconde, j’avais cette envie de devenir pro. Même si je ne suis pas passé par un pôle, je me suis mis à travailler pour grimper les échelons au fur et à mesure, glisse celui qui s’aménage deux séances hebdomadaires en musculation, en plus des 4 à 5 entraînements handball, avec son club ou son équipe universitaire. J’étais prêt psychologiquement à ce que ça prenne du temps pour arriver tout en haut."

Thibaud et un autre arrière gauche normand... (DR)

Cojean: "Un joueur vraiment complet"

Le Normand va finalement sauter quelques étapes en passant brillamment l’étape du test mijoté par Greg Cojean. "Il m’avait donné rendez-vous en fin d’après-midi et je suis arrivé un peu en avance. Mais quand j’ai vu arriver Rock Feliho, Nicolas Claire ou Kiril Lazarov, j’ai eu un petit coup de chaud", rigole Briet, qui finit par effectuer sa séance avec le centre de formation. "La première séance était une séance sur le travail individuel. J’ai eu l’impression d’avoir un joueur qui était là depuis le début de saison, qui comprenait très vite ce qu’on lui demandait, décrypte Cojean. Il est revenu le lendemain, pour une séance plus collective, et il m’a de nouveau fait un super entraînement. Il a montré qu’il avait beaucoup de savoir faire." Dans ce contexte, le « H » n’hésite pas à lui offrir une première convention de formation… et lui propose même de démarrer son aventure avec la prépa de l’équipe pro. "Je partais en vacs avec des copains quand j’ai reçu le message, j’ai dû écourter", sourit-il.

Propulsé de la Nationale 3 (avec une montée en N2 à la clé) à la Lidl Starligue en deux mois, Thibaud Briet épate très vite ses entraîneurs. "Il a tout de suite montré beaucoup de choses, même si physiquement il était un peu en-dessous, confirme le technicien ligérien, avant de se pencher sur le profil de sa trouvaille. Il est difficile de ressortir une qualité spécifique chez Thibaud. Il a déjà sa qualité de tir de loin, grâce à sa taille. Mais il est aussi capable de faire les bons choix dans le jeu, d’avoir un bon relationnel avec son pivot. Il est capable de déborder des deux côtés, ce qui est notable, et en plus il défend. C’est un joueur vraiment complet." De quoi convaincre Alberto Entrerrios de le coucher sur une douzaine de feuilles de match dès sa première saison, même si l’arrière est encore utilisé avec parcimonie. Il faut attendre la reprise de la saison en cours pour apprécier les qualités du jeune homme, passé pro dès le mois de mars 2020. Confronté à une vague de blessures sur les postes d’arrière gauche et de demi-centre, le « H » doit s’appuyer sur sa jeune pousse.

Et force est de constater que Thibaud Briet tient largement son rang, avec quelques prestations de haut vol, notamment à Kiel, en Ligue des champions. "J’ai eu déclic psychologique et je prends beaucoup de plaisir. L’ambiance est géniale au sein de l’équipe", souffle l’intéressé. "Il a vite assumé ses responsabilités, confirme Cojean. On savait qu’il avait des qualités sur ce qu’il montrait à l’entraînement, mais on ne savait pas ce que ça pouvait donner en match. Il nous a prouvé qu’il avait du mental et les capacités de tenir le poste d’arrière gauche en Lidl Starligue." Blessé depuis le mois de novembre, le Normand sait qu’il doit désormais enchaîner les matches pour continuer son incroyable percée dans le monde professionnel. "Il doit encore prendre de l’expérience, glisse Cojean, certain du potentiel de son protégé… si les petits cochons ne le mange pas. Je n’aime pas me prononcer trop à l’avance, mais il a le potentiel pour entrer, à terme, en équipe de France. Mais avant cela, il va falloir enchaîner les saisons et montrer de la régularité. Il faut prouver." Pas de quoi effrayer son jeune arrière gauche. "Bien sûr je l’ai dans un coin de ma tête, mais c’est encore très tôt. Je vais y aller étape par étape", conclut-il. Il sera alors temps d'imprimer la légende...

Benoît Conta

Crédits photos: PatricaSport et Stéphane Pillaud