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A la découverte de... Ludovic Fabregas

LNH - Publié le 14 avril 2016 à 16h19
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Chaque semaine, la LNH vous invite à aller à la rencontre de l’un de ses acteurs les plus en forme du moment. Ce jeudi place à Ludovic Fabregas, le pivot de Montpellier.

Un à un, les obstacles s’effacent, et le pied ne touche jamais terre. Si Ludovic Fabregas, 19 bougies au compteur, a déjà sa place bien au chaud au sein du groupe France, sa jeunesse passée à écumer les compétitions de VTT Trial n’y est sans doute pas pour rien. Champion d’Europe et du monde dans les catégories jeunes, le jeune homme originaire de Banyuls-sur-Mer a en effet suivi les pas de son père, Jean, et de son grand frère de quatre ans son aîné, Alexandre. "Je faisais du handball et là aussi il m’a suivi, note le frangin. On a aussi fait du tennis." Une jeunesse sportive, donc, mais à l’époque, rien ne prédestine le jeune Ludovic à devenir l’un des grands espoirs du handball français. Seule certitude pour le jeune homme, il ne fera pas de vieux os dans le VTT Trial. "C’est un sport très technique, et le vélo devenait de plus en plus petit, sourit-il. Ca commençait à devenir compliqué avec mon gabarit."

C’est le moment choisi par le hasard pour mettre son grain de sel dans la destinée du grand gaillard (1,98m, 100 kilos désormais). Un hasard provoqué par le grand frère. "Je suis allé faire mes études en STAPS à Montpellier, et j’ai croisé pas mal de joueurs du centre de formation de Montpellier comme Antoine Gutfreund, Rémi Desbonnet, Mathieu Grebille, Baptiste Bonnefond. Ca correspondait à l’année de détection pour Ludovic. Je lui ai dit de passer un week-end avec moi, histoire d’assister à un entraînement du centre de formation", se souvient Alexandre. Le déclic est immédiat. "A ce moment-là j’ai été vraiment attiré par le jeu, par la pratique du handball. Quand je suis rentré, j’ai eu cette envie soudaine de faire du haut niveau, alors que le week-end précédent je n’y pensais pas du tout", confirme le petit frère, qui s’inscrit aux tests du MHB, mais aussi du voisin nîmois.

"Une capacité d'analyse et de compréhension assez impressionnante"

Là encore, l’aîné des Fabregas souffle à l’oreille de son petit frère. "A l’époque, il jouait sur le poste d’arrière gauche, mais à un petit niveau, à Banyuls. Il manquait de culture handball. Mais sur le poste de pivot, vu son physique, j’ai pensé que ça pouvait être intéressant. Un mois avant, on a fait quelques exercices de bloc, de prise de position, et c’est à ce poste qu’il a été pris, explique-t-il, persuadé des chances de réussite de son frère. Je savais que mentalement, il était prêt à vivre une expérience comme le pôle espoirs." Et les faits lui donnent vite raison. Après une seule année en -16, Ludovic Fabregas passe un mois en -18, avant de vite rejoindre l’effectif réserve du MHB, en Nationale 1. "C’est une chose qui ne revient qu’à lui car lorsqu’il est rentré au pôle espoirs, il était le moins bon. C’était celui qui avait le moins de culture handball. Il a su s’adapter, écouter les entraîneurs", glisse Alexandre.

Un passage de handballeur du dimanche au monde professionnel que le jeune Ludovic doit à un physique hors-norme, mais aussi à ses capacités mentales. "Mentalement il était prêt à affronter les entraînements quotidiens, aller à l’école, se lever tous les jours, faire de la muscu… Il a aussi une capacité d’analyse et de compréhension assez impressionnante" poursuit le frangin, qui continue à jouer son rôle dans l’ombre. "Il a toujours été là pour m’orienter, me guider. Il est toujours en train de me conseiller pour me donner une vision plus large que celui du sportif fixé sur ses objectifs", confirme Ludovic. Un soutien moral efficace, qu’Alexandre Fabregas a cultivé dans ses études, en acquérant un Master en coaching sportif. "Je m’intéresse à la motivation, à la fixation d’objectifs, la confiance en soit, la gestion du stress... Je trouve ça génial de vivre ça avec mon frère. Ca m’a beaucoup apporté personnellement et je pense que ça lui a apporté aussi."

Et maintenant les Jeux ?

Couvé à Montpellier, le pivot grimpe les marches quatre à quatre, en intégrant le groupe pro à 17 ans, et Patrice Canayer le responsabilise rapidement au sein de sa défense. International juniors, il tape même dans l’oeil de Didier Dinart, sélectionneur chez les A, lors de l’Euro 2014 espoirs, en Pologne. Ce dernier fait appel à lui dans la foulée à l’âge de 18 ans. Une précocité qui rappelle celle d’un autre produit du centre de formation montpelliérain quelques années auparavant, Nikola Karabatic. "J’ai été séduit par ses qualités, confirme l’ancien défenseur des Bleus. Il ne faut pas hésiter à faire confiance à un jeune qui a ces moyens là. On n’a jamais douté des moyens de Ludovic à s’exprimer." De son côté, le Banyulenc a du mal à y croire. "Ce n’était pas envisageable pour moi, reconnaît-il. Je ne pensais pas qu’après quelques mois de Division 1, je pouvais accéder à ça."

Mais là encore il passe l’obstacle de l’intégration sans trop de frayeurs. "Il a beaucoup discuté avec Cédric Sorhaindo, Luka Karabatic et Michaël Guigou notamment. Ils l’ont pris en main, mais ils l’ont aussi laissé tout seul pour qu’il puisse s’affirmer par lui-même. Cédric Sorhaindo l’a pris sous son aile, alors que Michaël Guigou l’a plutôt laissé se débrouiller tout seul. Il a été présent pour tout ce qui était hors handball, mais pour le handball, il l’a laissé s’intégrer tout seul pour qu’il puisse rentrer dans ce groupe seul et non pas accompagné", explique son frère. Pour le reste, Ludovic Fabregas n’a pas tardé à faire l’unanimité chez les sélectionneurs. "Ludovic est un joueur que les entraîneurs aiment bien. Il sait rester à sa place, il respecte les étapes à franchir. Il ne faut pas se presser. Il reste travailleur, mesuré, confirme Didier Dinart, qui l’intègre petit à petit à sa défense. C’est un jeune joueur, il doit faire les choses les unes après les autres. S’il arrive à s’installer sur le plan défensif, ça viendra en attaque. Il n’y a pas le feu."

Gros défenseur, Ludovic Fabregas a d’ailleurs bien conscience qu’il lui reste encore une belle marge de progression sur le plan offensif. "La défense est sans doute mon point fort mais j’ai encore beaucoup de choses à améliorer. Il y a aussi la projection en montée de balle, le jeu rapide et surtout un gros travail en attaque. J’ai encore le temps d’apprendre même si j’ai envie d’aller plus vite, conclut Ludovic Fabragas, plutôt flegmatique à l’heure évoquer la possibilité de vivre ses premiers JO cet été, à 20 ans. Je ne vais pas dire que je m’habitue mais depuis que je suis à Montpellier les choses se sont accélérées. J’ai rapidement joué des matches importants en Ligue des champions, et le reste s’est enchaîné. Maintenant je dois encore beaucoup travailler. Je suis encore jeune. Si ce n’est pas ces JO, ça sera les suivants…" Pas sûr cependant qu’il pose le pied à terre sur ce nouvel obstacle…

Benoît Conta