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Rock Feliho: ''Savoir que j'ai inspiré des jeunes, c'est une fierté''

LNH - Publié le 23 juin 2021 à 13h24
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Tout jeune retraité, Rock Feliho revient pour nous sur les grands moments de sa longue carrière.

Ma première licence

« C’était à Chalon-sur-Saône. J’avais envie de tester après y avoir pris goût à l’école. L’éducateur m’avait conseillé de venir essayer en club. Je faisais du foot et j’ai choisi de changer. Ma mère m’a emmené au club de Chalon, ce devait être en benjamins, j’avais 11 ans. Mon entraîneur, Pascal Gaudillère, m’a reçu et je suis arrivé avec mes belles genouillères que je venais d'acheter. (rires) Je me suis entraîné et j’ai vite trouvé ça assez cool. Je ne sais pas si j’avais des qualités... Quand tu es jeune tu t’amuses. Nous, on gagnait nos matches, mais c’était un des meilleurs clubs de la région. J’ai fait des sélections départementales et régionales, mais j'étais avec la plupart des coéquipiers de mon équipe donc je ne faisais pas trop attention à ça. »

La première fois que j'ai pensé à devenir pro

Crédit: Club de Chalon

« La première fois que j’ai commencé à me dire que je n’étais pas mauvais, c’était lors de mon premier stage national. J’étais dans les 50 meilleurs joueurs de France. Là je me suis dit: « ah c’est pas mal ». (sourire) C’est d’ailleurs là que j’ai croisé pour la première fois Michaël Guigou. Et on a terminé dans le groupe 3, celui des pas très bons. (rires) C’est là qu’on a accroché car on n’était pas trop d’accord avec ce choix-là. (sourire) Un peu plus de vingt ans plus tard, nous sommes encore très proches. Micka, c'est la famille. Le fait de jouer ensemble, ça n'a jamais pu se faire, même s'il a été un temps en contacts avec Nantes. Mais mon seul regret, c'est de n'avoir jamais réussi à l'attraper sur le terrain. Ce n'est pas faute d'avoir essayé, mais il est plutôt rapide. (sourire)  »

Mon premier match avec les pros

« Je m’en souviens comme si c’était hier. C’était à Ivry, avec Sélestat. J’avais été pris, et à l’époque je défendais devant, sur Jan Paulsen. On avait perdu, mais j’avais marqué mon petit but, et je me souviens de mon retour en défense. Stéphane Schmidt, le défenseur exclusif de l’époque, un ancien, m’avait félicité. Ca m’avait marqué. D’ailleurs, il bosse désormais pour mon équipementier et on bosse encore ensemble. Et moi, j’ai pris son rôle de défenseur attitré. (sourire) Il m’avait appris quelques trucs à l’époque. »

Mon entraîneur le plus marquant

« Dois-je répondre à cette question ? (rires) C'est forcément Thierry Anti. C'est un personnage marquant, celui qui m'a le plus fait confiance. Tant humainement que professionnellement, il est pour beaucoup dans ma progression. Il m'a permis de m'exprimer de la meilleure des manières, et si j'ai duré aussi longtemps, c'est sans doute un peu grâce à lui. Même si je n'étais pas trop d'accord avec lui quand il m'a confié le rôle de défenseur, il m'a un peu arnaqué pour le coup. (rires) Plus sérieusement, c'est un vrai personnage, il a pu être dur à des moments, mais c'est un bon. Un vrai. Je ne peux en dire que du bien. »

Mon meilleur ami dans le handball

« Ca ce n'est pas possible, j'en ai trop. (sourire) Je ne dis pas que je n'ai que des amis, attention. Il doit bien y avoir des mecs qui ne m'aiment pas. (rires) Mais je me suis fait de très bons amis. Le plus connu, je ne vais pas le cacher, c'est Mike (Guigou, ndlr). Mais, dans mon équipe, j'ai Olivier (Nyokas), Valero (Rivera), Bala (David Balaguer), plein de mecs qui sont partis aussi comme Nico (Claire), OB (Nyateu) ou (Nicolas) Tournat. Difficile d'en ressortir un plus qu'un autre. Et encore, là je te parle des contemporains, car il y a plein de mecs avec qui j'ai joué, comme Sassi (Boultif), avec qui on a vécu de sacrés trucs. Et, même si on ne s'appelle pas, ce sont de vraies relations. »

Mon coéquipier le plus fort

« Oh mais c'est pareil, c'est compliqué là ! (rires) J'en ai vu passer beaucoup, je suis chanceux. J'ai toujours joué avec des supers joueurs. Je me souviens à mes débuts, il y avait Seufyann Sayad. C'était incroyable à l'époque, le mec savait tout faire. Et puis moi je voyais ça avec mes yeux de jeunot. Après, il est parti à Chambéry, et je me souviens d'un Eurotournoi, la base arrière c'était Narcisse/Sayad/Stoecklin. C'était pas mal, non ? (rires) Après, je dois citer Guigou, il est fort depuis qu'il est petit, lui. (sourire) Et puis à Nantes, j'ai quand même croisé de beaux petits joueurs. Valero, dès qu'il est arrivé, c'était fort, et puis il y a les pépites que j'ai vu grandir: Tournat, OB, Dragan (Pechmalbec) ou Théo (Monar), j'ai été servi ! Et puis il y a Nico (Claire) qui était quand même très, très fort... Et puis, je ne parle même pas d'Emil (Nielsen) ! (rires) Bref, j'ai vraiment eu la chance de jouer à ce niveau-là. Je les ai martyrisés un peu. Bon, j'ai aussi pris des vents, je dois le reconnaître. (rires) Mais comme je suis de mauvaise foi, et que j'ai le privilège de l'âge, je reste celui qui gagne à la fin. (sourire) »

Mon coéquipier le plus fou

« Ah c'est Maqué (Jorge Maqueda, ndlr) ! (rires) Il y a aussi Mahmoud Gharbi. Ces deux-là, c'était pas mal. Ils étaient fous, mais dans le bon sens du terme. C'était des mecs complètement engagés, au max du max. Mais parfois trop. A l'époque, on avait une 3-2-1 en défense, et on s'envoyait bien. Mais parfois, on allait voir Maqué, on lui disait: "Là, on ne fait pas de faute, c'est important, tu ne découpes personne". Et l'action d'après il découpait un mec. (rires) Mais il ne le faisait pas exprès, il était désolé ! Thierry, ça le rendait fou ! Et Mahmoud, c'était également le même style. »

L'adversaire le plus difficile à affronter

« J'en ai rencontré pas mal, mais je vais dire Sander Sagosen. Bon j'ai réussi à l'attraper un peu, mais c'était très, très fort. Les deux dernières années au PSG, il portait l'équipe. Bon je le dis maintenant parce que j'arrête ma carrière, sinon je n'aurais cité personne. (rires) Ah si, il y a aussi la nouvelle mode des petits modèles. Ca c'est chiant. (sourire) Pas simple de les attraper, ça rend les choses plus compliquées. Après, en pivot, j'ai eu la chance, avec Tournat, de jouer avec le meilleur.. (sourire) »

Mon adversaire préféré

« Le PSG, forcément. Affronter les meilleurs joueurs du monde, c'est forcément excitant. C'est trop bien. Moi qui n'ait pas eu l'équipe nationale, c'était mon vrai plaisir. Après, c'était dur, il faut le reconnaître. Mais on a réussi à gagner à quelques reprises, et gagner face au PSG, ça a toujours un peu plus de saveur. Et je ne dis pas ça en tant que supporter de l'OM. (rires) C'était surtout le fait de se mesurer à ce qu'il se fait de mieux. Et, avant le PSG, il y a eu Dunkerque. A l'époque, on s'envoyait pas mal lors de ces matches-là. Si tu marquais plus de 20 buts, t'étais bien. (sourire) »

Un regret ?

« Il y a forcément l'équipe de France. J'aurais aimé porté ce maillot. Et puis il y a aussi le fait de ne pas avoir été champion de France avec Nantes. On a tous les titres, mais pas celui-là. Je pense que le club le mériterait, ça fait quelques années que l'on tourne autour. J'aurais aimé ce titre en plus. Maintenant c'est passé, c'est comme ça, et je n'ai pas de rancoeur. »

Une fierté ?

« Ma fierté, c'est ma carrière. Même si je n'ai pas porté le maillot de l'équipe de France, je pense avoir inspiré des mecs. Avec mon arrêt, j'ai reçu plein de messages, plein de témoignages vraiment chouettes et sincères. Ca c'est une vraie fierté. J'ai reçu des messages de jeunes qui m'ont dit qu'ils avaient envie de défendre comme moi, d'avoir mon rôle. C'est beau car à la base, ce n'est pas le rôle le plus reluisant. Savoir que j'ai inspiré des jeunes, c'est beau non ? Et au final, même si je ne suis pas allé en équipe de France, je pense avoir fait une plus belle carrière que certains qui l'ont porté. Je n'ai vraiment que de la fierté à l'heure de ranger les baskets. (sourire) »

Mon pire souvenir

« Lorsque je me suis blessé au pectoral, il y a deux ans. Quand le médecin m'a annoncé qu'il fallait passer par l'opération, et que j'en avais pour huit à dix mois de rééducation, c'était compliqué. J'avais 37 ans, et j'ai reçu un bel uppercut, une bonne grosse baffe. (sourire) Après, j'ai demandé à avoir un autre avis médical, et j'ai décidé de ne pas me faire opérer. J'ai ensuite passé trois mois sans vacances, à bosser avec le staff, et j'ai pu rejouer... »

Mon meilleur souvenir

« La demi-finale du Final4 de la Ligue des champions, en 2018 (victoire contre le PSG, 32-28). Ca c'était pas mal. Pour tout ce que ça a engendré, c'était un moment vraiment incroyable. Tous les gens qui étaient autour de nous, qui ont partagé ces moments, ils ne l'oublieront jamais. Bon, après, il y a forcément la finale perdue (face à Montpellier), qui reste en travers de la gorge. Mais tout était tellement incroyable, notamment lorsqu'on est rentrés à Nantes, tous les témoignages que l'on a reçu... Je pense d'ailleurs que si les supporters n'avaient pas été là, on aurait encore cette défaite en travers de la gorge. Mais tout ça a été atténué par le bonheur qu'on a pu procurer aux gens. Et puis il y a aussi mon dernier match, avec le fait qu'on retire mon maillot à la H Arena. Je ne vais pas cacher que ça m'a fait quelque-chose, c'était vraiment quelque-chose de fort. (sourire) »

Pourquoi arrêter ?

« J'aurais pu jouer une année de plus, et j'ai reçu de belles propositions. Mais si je devais continuer à jouer, c'était forcément à Nantes. Maintenant le staff sportif n'avait pas la même volonté et j'ai choisi d'arrêter. Ca me permet de m'arrêter en haut, sur un Final4 de la Ligue des champions, sur une troisième place, après 20 ans de carrière. C'est pas mal, non ? »

Et maintenant...

« J'ai une reconversion qui m'attend au club. Je vais enfiler le costume ! (rires) Pour cela, je dois déjà remercier le président, qui m'a vraiment accompagné dans ce projet. Maintenant, j'ai commencé il y a quelques mois un master en management à l'EM Lyon, que je dois terminer en 2022. Ca va me permettre d'affiner un peu plus mon rôle, savoir ce que je peux maîtriser. Parce que le but, c'est d'être bon dans ce que je fais. Je n'ai pas envie d'être une flûte, ou une plante qu'on sort au VIP de temps en temps. (rires) Je veux un vrai rôle, que l'on n'a pas encore vraiment défini. Ca va venir. Mais je sais que le président a déjà sa petite idée. (sourire) En attendant, je profite un peu d'une retraite bien méritée. J'ai le droit, non ? (rires) »

Benoît Conta

Crédit: HBC Nantes